Contribution des EEE au déclin des lézards et de la flore de Nouvelle-Calédonie

La Nouvelle-Calédonie abrite de nombreuses espèces endémiques avec plus de 75 % de la flore et 90 % des lézards de l’archipel présents nulle part ailleurs et constitue un point chaud de la biodiversité mondiale. Au terme d’un état des lieux conduit sur près de 10 ans, 69 espèces de reptiles et 643 espèces de plantes se révèlent menacées de disparition avec comme principales causes : les incendies (feux de brousse d’origine humaine accentués par la sécheresse), les activités minières et les espèces exotiques envahissantes (EEE).

Cet état des lieux a porté sur une grande partie des lézards (comprenant les geckos et les scinques). Au total, sur 104 lézards indigènes connus dans l’archipel, 66 % sont menacés et pourraient disparaitre si aucune mesure de conservation n’était renforcée. D’après cette analyse, les EEE menacent la totalité des espèces étudiées. La Petite fourmi de feu (Wasmania auropunctata) en particulier, contribue au classement « En danger critique » du Diérogecko du Sommet de Poum. De plus, les chats harets et les rats noirs affectent de nombreux lézards comme le Bavayia de Goro classé « En danger ». Par ailleurs, la dégradation des habitats de certaines de ces espèces est accentuée par des modifications profondes de la végétation provoquées par la pression d’herbivorie des cerfs et des cochons introduits.

Bavayia de Goro (Bavayia goroensis)
« En danger »
© Thomas Duval
Petit gecko présent exclusivement dans les maquis pré-forestiers et dans les forêts denses aux sols miniers du Grand Sud, soit quelques centaines de m². Son habitat a été particulièrement fragmenté par l’exploitation forestière et minière et par les incendies volontaires. A ces menaces toujours très actuelles s’ajoutent la pression de prédation des petites fourmis de feu, des chats harets et des rats.

 

Mniarogecko jâlu (Mniarogecko jalu)
« En danger »
© Thomas Duval
Gecko géant endémique de l’extrémité nord de la Grande Terre et des îles Bélep. Il occupe l’une de des zones les plus régulièrement et extensivement incendiées en Nouvelle-Calédonie où il reste cantonné aux lambeaux relictuels de forêts fragmentés, soumis à la consommation des cerfs rusa ou parfois du bétail. Il est globalement soumis à la pression des EEE, notamment des fourmis envahissantes.

Phoboscinque de Bocourt (Phobocsincus bocourti)
« En danger crtique »
© Hervé Jourdain
Plus grand lézard de Nouvelle-Calédonie (30 cm de long), il est l’un des plus rares au monde avec une aire de répartition de moins de 50 ha et moins d’une quinzaine d’observations pendant 150 ans. Sa rareté est amplifiée par la disparition de ses habitats naturels et la propagation des rongeurs, chats, chiens et fourmis introduites.

 

Concernant la flore, sur les 1624 espèces évaluées dans le cadre de cet état des lieux, 40% sont menacées et 221 autres quasi menacées (14%), soit plus de la moitié des espèces végétales qui pourraient disparaitre si les mesure de conservation n’étaient pas suffisantes. Près de la moitié des espèces végétales indigènes évaluées sont menacées par au moins une EEE. Le Cerf rusa par exemple, exerce une forte pression en consommant les pieds ou les graines des végétaux, entravant la régénération des forêts de basses altitudes. Avec la présence également de rats, de chèvres ou encore de cochons, les arbustes comme Pittosporum tanianum ou la fougère Ptisana rolandiprinciois sont désormais proches de l’extinction et classés « En danger critique ». Les plantes exotiques contribuent également au déclin de plantes indigènes par compétition spatiale et trophique. Des champignons introduits peuvent aussi devenir des pathogènes et affecter les plantes indigènes comme Austropuccinia psidii à l’origine de la rouille des Myrtacées.

Tristaniopsis polyandra
« En danger crtique »
© Guillaume Lannuzel
Arbuste de la famille des Myrtacées présent dans les maquis arbustifs et forêts mésophiles de basse altitude uniquement dans deux branches de la vallée de la Dumbéa. Menacé par les feux, il est aussi touché par la rouille des Myrtacées. Ce champignon est responsable de la mort de juvéniles et de la perte d’un grand nombre de fleurs empêchant ainsi la reproduction de l’espèce.

Megastylis paradoxa
« Vulnérable »
© Christian Laudereau
Orchidée endémique, voire micro-endémique des Monts Humboldt et Kouakaoué, elle pousse à plus de 1300 m d’altitude. Elle est principalement menacée par les mammifères introduits tels que les cerfs et les cochons et par les mauvaises conditions climatiques récurrentes, comme la sécheresse.

Cyrtandra mareensis
« Vulnérable »
© Christian Laudereau
Espèce endémique parmi les plus rares des îles Loyautés, elle est présente seulement sur des falaises calcaires exposées aux embruns des îles de Lifou et Maré. Sévèrement fragmentée par l’éloignement de ces îles, elle est principalement menacée par les EEE. En plus de la pression d’herbivorie exercée par les chèvres, les plantes exotiques entrent directement en compétition avec elle pour la ressource et l’espace.

Pour faire face aux impacts des EEE, des travaux de gestion de ces espèces sont conduits en Nouvelle-Calédonie et sont encadrés par une stratégie locale de gestion déclinée en plan d’action quinquennal. Ce dernier implique plusieurs acteurs du territoire et est coordonné par l’Agence néocalédonienne de la biodiversité (ANCB). Le premier plan d’action est arrivé à son terme en 2022. Son évaluation et la définition d’un nouveau cadre d’action pour la période 2023-2028 ont été réalisées.

Cet état des lieux des lézards et de la flore de Nouvelle-Calédonie a été réalisé par l’association Endemia dans le cadre de la Liste rouge mondiale des espèces menacées. Ces travaux ont bénéficié de la contribution des organisations scientifiques du territoire et de l’expertise d’un réseau de plus de 100 spécialistes. Ces résultats intègrent désormais la Liste rouge nationale des espèces menacées de France coordonnée par le Comité français de l’UICN, l’OFB et le MNHN.

En savoir plus :

 

 

Photo du Haut de page : Sommet du Mont Humboldt © Benoît Henry

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