A la rencontre de David Ringler : Consultant en gestion des mammifères envahissants (Kiore Services)

 David Ringler a rejoint le Réseau EEE outre-mer et a répondu à nos questions.

© D. Ringler

1) Pouvez-vous vous présenter en quelques mots et nous parler de votre parcours ?

Originaire de métropole, je suis un pur produit de la formation réunionnaise à l’écologie puisque j’y ai effectué toute la fin de ma scolarité jusqu’à l’obtention d’un doctorat sur l’écologie des rats envahissants dans les îles de l’océan Indien. J’ai passé presque 15 ans à travailler principalement sur la problématique des mammifères envahissants dans les îles (océan Indien et Pacifique), d’abord par le prisme de la recherche puis très rapidement via le travail de conservation et de restauration, notamment au sein des Terres Australes et Antarctiques Françaises (TAAF). Tout au long de ces années j’ai noué des liens étroits avec une communauté d’experts à l’étranger, ce qui m’a permis dernièrement de travailler pour des organismes et des experts internationaux de la gestion des espèces envahissantes que j’admire depuis longtemps. Depuis presque un an j’ai décidé de monter ma société (Kiore Services) pour répondre au mieux aux besoins de toutes les organisations et collectivités qui souhaiteraient bénéficier d’un appui technique et/ou scientifique pour la gestion des mammifères envahissants sur leur territoire.

2) Vous travaillez depuis plusieurs années sur la gestion des mammifères introduits, pouvez-vous nous en dire un peu plus ?

Mon travail a surtout consisté à étudier et gérer des populations de mammifères introduits dans une grande variété de contextes insulaires. Cette variété est liée aux expériences professionnelles que j’ai pu vivre (La Réunion, Madagascar, Polynésie française) mais surtout au fait d’avoir bénéficié via les TAAF d’un terrain de jeu incroyablement contrasté avec un territoire s’étendant des tropiques (Iles Eparses) à l’Antarctique en passant par les îles Australes. Au cours de ces années passées à comprendre, traquer entre autres rats, souris, chats ou chèvres sur toutes ces îles, j’ai pu appréhender tous les métiers qui se cachent derrière la gestion des mammifères envahissants, qu’il s’agisse de l’acquisition de la base scientifique qui supporte un projet de gestion jusqu’à toutes les étapes de planification d’une opération ainsi que sa mise en œuvre sur le terrain et son évaluation. Au travers de ma société Kiore Services, je me suis aujourd’hui mis au service de toutes les organisations qui souhaitent monter et mettre en œuvre des programmes de lutte contre des populations de mammifères envahissants aux quatre coins du monde.

3) Sur quel(s) projet(s) êtes-vous actuellement mobilisé ?

Travail préparatoire à l’éradication des rats sur l’atoll de Tetiaroa.                                                    © D. Ringler

Actuellement, je fais le grand écart entre un projet d’éradication de rats qui vient de s’achever sur un atoll Polynésien (Tetiaroa), dont j’assure le suivi et la valorisation scientifique pour l’Université d’Auckland et Island Conservation, et le conseil à la planification et la mise en œuvre de projets d’éradication dans les TAAF (dans le cadre du programme RECI financé par l’Union Européenne) incluant l’opération majeure d’éradication des rongeurs et des chats de l’île Amsterdam. En plus de ces activités qui consomment énormément de mon temps, j’assure du conseil plus ponctuel à d’autres projets (ONG, établissement publics) sur le montage de protocoles d’études scientifiques en lien avec la gestion de populations envahissantes et sur l’évaluation de choix méthodologiques de gestion.

 

4) Souhaitez-vous partager un retour sur une intervention de gestion en particulier ?

On n’oublie jamais le premier projet qu’on pilote ! Pour moi, il s’agit de l’éradication des chats harets de l’île Juan de Nova que j’ai coordonnée en 2015 ; l’opportunité d’apprendre son métier « en vrai », d’être à l’écoute de tous et de s’abreuver d’informations jusqu’à l’écœurement, de rencontrer des spécialistes et des opérateurs incroyables et de, bien sûr, essuyer les pires difficultés, ce qui finalement nous rend meilleurs pour le projet d’après. Évidemment cela reste aussi une aventure humaine marquante puisque on embarque souvent à beaucoup dans ce genre d’opérations et que le succès de l’opération réside beaucoup dans la motivation de chacun à atteindre l’objectif d’éradication.

5) Comment imaginez-vous « l’avenir » de la gestion des prédateurs introduits ?

L’impact des mammifères envahissants est sans conteste une problématique majeure quand on parle d’érosion de la biodiversité, tout particulièrement en milieu insulaire, et beaucoup de pays se sont emparés du sujet en mobilisant des ressources, des compétences, l’opinion publique et les décideurs politiques pour aboutir à la mise en œuvre d’un très grand nombre d’opérations de contrôle ou d’éradication dans des contextes insulaires toujours plus complexes (îles habitées et de grande taille par exemple). Malgré un potentiel de restauration écosystémique incroyable, compte tenu du nombre très important d’îles envahies par des populations exotiques de mammifères, la France reste un peu en retrait en matière d’action, ce qui à la fois m’inquiète et me motive devant la quantité de projets à mener. A l’échelle des outremer français, le défi est donc immense mais il me semble que depuis plusieurs années les efforts produits, notamment par la société civile, sont de bonne augure, comme en témoignent les programmes de lutte lancés récemment dans le Pacifique, l’Océan Indien et les Caraïbes. Et apporter ma contribution à cet élan est une source incroyable de satisfaction au quotidien.

Photo du haut de page : Colonie de sternes fuligineuses sur l’île d’Europa. © D. Ringler

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