Gestion à grande échelle des chats errants et des rats pour la préservation des deux pétrels endémiques de La Réunion dans le cadre du programme Life + Pétrels (2014-2020).
Une progression remarquable des mesures de régulation des espèces exotiques envahissantes pour la préservation d’espèces à enjeu de conservation fort.
Le programme Life+Pétrels vient de s’achever après la mise en œuvre pendant 6 ans de nombreuses mesures pour la préservation des deux espèces de pétrels endémiques de La Réunion ; le Pétrel de Barau (Pterodroma baraui) et le Pétrel noir de Bourbon (Pseudobulweria aterrima). Ce travail, coordonné par le Parc national de La Réunion, a été réalisé en partenariat avec 3 co-bénéficiaires : L’Université de la Réunion, la SEOR et l’OFB et plus de 30 partenaires techniques locaux, nationaux et internationaux. Il a également été co-financé par le Département de La Réunion et la Direction de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement (DEAL) de La Réunion. Il constitue une avancée considérable en matière de conservation d’espèces menacées notamment à travers le contrôle de prédateurs introduits. L’utilisation de nouvelles technologies, la mobilisation importante de moyens humains et l’évolution juridique et technique conduite pour lever les freins réglementaires et les contraintes liées à la réalité du terrain, en font un programme particulièrement innovant.
Le Pétrel de Barau et le Pétrel noir de Bourbon sont deux espèces menacées à l’échelle mondiale et sont respectivement classées “En danger” et “En danger critique” d’extinction sur la liste rouge mondiale de l’UICN. Le Pétrel noir de Bourbon est actuellement considéré comme l’une des 15 espèces les plus rares au monde, très peu de connaissances existaient sur cet oiseau avant le lancement du projet. Il est donc apparu urgent d’intervenir. Le programme Life+Pétrels a également renforcé les plans d’actions déjà mis en place pour ces oiseaux marins.
Les chats et les rats, principales menaces
L’une des principales menaces pour ces pétrels est la prédation par des mammifères introduits depuis environ 300 ans sur l’île : le Chat domestique (Felis catus) et le Rat noir (Rattus rattus) sont en effet présents dans les colonies et les zones reproduction. Les rats se nourrissent des œufs et des oisillons tandis que les chats consomment les adultes. Une étude réalisée en 2009, consacrée aux contenus stomacaux des chats errants présents dans les colonies, a démontré que le Pétrel de Barau constitue plus de 60 % de leur régime alimentaire. Il a également été estimé qu’un seul chat peut être à l’origine de la disparition de 90 pétrels par an. Le contrôle de ces prédateurs a donc été identifié comme l’un des leviers d’action prioritaires pour la préservation des populations de pétrels.
Un contrôle, structuré à grande échelle, des chats errants et des rats a donc été déployé pour optimiser la régulation et pour stopper la prédation au sein des colonies.
• Le Pétrel de Barau nidifie en falaise à des altitudes élevées (jusqu’à 3000m). Les colonies sont difficilement accessibles pour les opérateurs alors qu’elles sont fréquentées par les prédateurs.
• Une étude préalable sur les populations de chats et des études comportementales ont été menées pour ajuster et optimiser le protocole dès 2016.
• Après deux ans de travail juridique, l’obtention d’un arrêté préfectoral pour l’utilisation de pièges létaux (conibear et Tim’s trap) a permis d’augmenter fortement le nombre de captures.
• La surface contrôlée a été étendue grâce à l’intégration d’un chantier d’insertion professionnelle piloté par l’AVE2M, une association locale. La régulation des chats a donc aussi été faite en périphérie des colonies pour empêcher une recolonisation potentielle.
• Une campagne de stérilisation des chats a été mise en place dans les secteurs à forts enjeux pour éviter leur retour dans les colonies.
• La pose de raticides cumulée à des pièges à pistons (A24 Goodnature) a été concentrée en priorité dans les colonies et ponctuellement en périphérie, pour une gestion efficace et régulière des rats pendant la saison de reproduction des pétrels, en évitant les atteintes à d’autres espèces non cibles.
• Les deux colonies de Pétrel noir de Bourbon découvertes et les autres sites fréquentés sont situés dans des falaises extrêmement verticales ne permettant pas une lutte efficace contre les prédateurs. Pour mieux sécuriser adultes et poussins, deux colonies artificielles ont été installées dans des secteurs plus accessibles, favorables à la régulation des chats et des rats, afin de permettre une amélioration du succès reproducteur.
Depuis l’arrivée des habitants sur l’île au XVIIème siècle, la diversité de l’avifaune a connu une forte diminution de 61 % dont 12 espèces endémiques. 20 espèces d’oiseaux ont disparu en 350 ans. La Réunion est sans doute le territoire national où les animaux errants sont les plus nombreux. Les résultats de ce programme sont donc porteurs d’espoir et soulignent la nécessité de maintenir ces actions de gestion.
Source : Rapport Layman Life+Pétrels et site internet du Programme Life+Pétrels
Contact : Benoît Lequette